mardi 23 janvier 2018

Petite histoire du calendrier et du nouvel an berbère




Le calendrier berbère (amazigh) est le calendrier utilisé traditionnellement en Afrique du Nord. Il est employé pour régler les travaux agricoles saisonniers. Le calendrier berbère présente des similitudes avec le calendrier julien par le décalage hérité de la réforme du calendrier grégorien.
Ce calendrier, et notamment la numérotation des années (le calendrier est décalé de 950 années par rapport à l'ère commune : 2018 de l'ère commune correspond à 2968 du calendrier berbère), est une référence culturelle pour les Berbères.

Les calendriers plus anciens
Il existe peu d'informations sur la division du temps chez les Berbères de l'Antiquité. Quelques éléments d'un calendrier préislamique et probablement également pré-romain apparaissent dans quelques écrits médiévaux étudiés par Van den Boogert (2002). Des points communs avec le calendrier traditionnel des Touareg font penser qu'il existait effectivement dans l'Antiquité, avec une certaine diffusion, un compte du temps « berbère », organisé sur des bases autochtones.


Tableau 1 - Les mois berbères
tiré d'œuvres médiévales

(Van den Boogert 2002)
Nom du mois
"Signification"
1
tayyuret tezwaret
première lune
2
tayyuret teggwerat
dernière lune
3
yardut
 ?
4
sinwa
 ?
5
tasra tezwaret
premier gardiennage de troupeau
6
tasra teggwerat
dernier gardiennage de troupeau
7
awdayeɣet yezwaren
Les premiers antilopins
8
awdayeɣet yeggweran
Les derniers antilopins
9
awzimet yezwaren
Les premiers petits de la gazelle
10
awzimet yeggweran
Les derniers petits de la gazelle
11
ayssi
 ?
12
nim

 ?


Nous ne disposons pas d'éléments suffisants pour reconstruire intégralement ce calendrier originel. On peut cependant relever certaines caractéristiques intéressantes, par exemple le fait que beaucoup de noms de mois apparaissent par paires, (parfois même par groupe de trois dans le monde touareg), ce qui fait penser à une division de temps différente de l'ordinaire en mois de 30 jours environ.
Des informations ultérieures, difficiles cependant à préciser et à mettre en relation avec le reste de la situation dans le reste de l'Afrique du Nord, peuvent être tirées de ce que l'on sait sur la manière de compter le temps des Guanches des îles Canaries. Selon un manuscrit du XVIIe siècle de Tomás Marín de Cuba,
« Ils comptaient leur année, appelée Acano, en lunaison de 29 jours (soleil) à partir de la nouvelle lune. L'année commençait en été lorsque le soleil entrait dans le Cancer le 21 juin : après la première conjonction, c'est-à-dire après la première nouvelle lune succédant au solstice d'été, ils faisaient neuf jours de fête pour la récolte » (Citation provenant de Barrios García (1997: 53), en espagnol ; testo inglese in Barrios García (1995: 4).

Ce même manuscrit révèle, que des représentations graphico-picturales de ces évènements calendaires avaient été réalisées sur divers supports. Sur cette base, certains spécialistes modernes ont voulu voir dans une série de peintures géométriques retrouvées dans quelques cavernes de la Grande Canarie des descriptions d'événements astronomiques liés aux cycles annuels. Toutefois, les résultats de ces études sont pour le moment hautement hypothétiques (voir J. Barrios García 1995 et 1997). De même, un seul nom de mois nous est parvenu dans la langue orale et transmis comme Beñesmet ou Begnesmet( Barrios García (2007: 331 e passim).   , probablement le deuxième mois de l'an, correspondant au mois d'août.
Ce nom, s'il était composé de wen "celui à" + (e)smet (o (e)zmet? pourrait se trouver dans la liste des mois Berbères du Moyen Âge, correspondant aux neuvième et dixième mois awzimet (proprement aw "fils de" + zimet "la gazelle"). Mais les données sont trop limitées pour enquêter sur cette hypothèse (Sur le sens du nom médiéval des mois awzimet yezwaren et awzimet yeggweran, et leur relation possible avec le mois Touaregs ǎwžém yǎzzarǎn et ǎwžém as-eššin (Ahaggar ǎwhim wa yezzǎren et ǎwhim wa ylkemen), cf. van den Boogert (2002: 144).

Origine
Le calendrier berbère est le calendrier agraire utilisé par les berbères durant l’antiquité. Le calendrier berbère est de fait assimilé au calendrier julien avec une origine antérieure (Vincent Battesti, « Les échelles temporelles des oasis du Jérid tunisien », Anthropos, vol. 95, no 2, 2000, p. 419-432).
De nos jours, ce calendrier est en effet employé pour régler les travaux agricoles saisonniers, de préférence au calendrier grégorien et au calendrier musulman. Ce dernier est en effet lunaire et n'a aucun lien avec le cycle des saisons: et s'il est utile pour calculer les fêtes religieuses, il ne se prête pas à un emploi en agriculture.
Il existe un décalage de 14 jours entre le calendrier grégorien et le calendrier berbère. Sa base de calcul étant identique à celle du calendrier julien, les Berbères fêtent donc la nouvelle année le 14 janvier du calendrier grégorien ce qui correspond au premier jour du mois Yennayer du calendrier berbère.
En Algérie cependant — probablement à la suite de renseignements erronés de quelques associations culturelles — la date la plus répandue pour le nouvel an berbère est le 12 janvier.
Au Maroc, il existe un rituel du nouvel an. Exemple des régions à le fêter Ait-Baha.


Mode de calcul pour le calendrier actuel

Le calendrier berbère traditionnel n'était pas lié à une époque ni au respect d'un calcul rigoureux.
Chez les Touareg  sont conservées les méthodes traditionnelles de calcul des années. Les années ne sont pas dotées d'un numéro, mais chacune est dotée d'un nom qui la caractérise (ainsi l'histoire touarègue est répertoriée).

Le rôle de l' Académie berbère dans la conception du calendrier berbère :

D'abord , deux mots à propos de cette Académie berbère (en kabyle : Agraw imaziɣen) était une association culturelle basée à Paris et vouée aux cultures berbères; elle est dissoute depuis. Amokrane, Taous Amrouche, Mohand Arab Bessaoud qui sera parrainé par Jacques BénetÀ partir des années 1968/70, le bureau de cette académie comprenait :
·        un président : Mohand Said Hanouz, professeur de pharmacologie et écrivain ;
·        un vice-président : Youssef Achour, ancien sous-préfet et sénateur ;
·        un secrétaire général : Hamici Hamid, animateur de la chaîne de radio kabyle ;
·        une trésorière : Mme Mina Charlette.
Mohand Arab Bessaoud assurait les fonctions de secrétaire de l’association. Le travail de l'Académie berbère a contribué à l’éclosion et à l’éveil des consciences pour la reconnaissance de l’identité et de la culture amazighes, notamment en Algérie. L'association aurait été finalement dissoute en 1978, à la suite de pressions du gouvernement algérien sur la France.
L’Académie berbère proposa un alphabet standard sur la base des tifinagh diffusés en Algérie, dans le but de faire revivre une écriture vieille de plusieurs millénaires, et de transcrire l'ensemble des dialectes berbères.
Périodiquement, et souvent en tifinagh, elle publiait la revue Imazighen.
L'Académie berbère est également à l'origine de la création du drapeau berbère.

Revenons-en , maintenant à son rôle dans la confection du calendrier dit berbère: À partir des années 1960, à l'initiative de l'Académie berbère de Paris, certains Berbères ont commencé à calculer les années à partir de 950 av. J.-C., date approximative de l'accession au pouvoir du premier pharaon libyen en Égypte, Sheshonq Ier (Cacnaq) fondateur de la 22e dynastie égyptienne (Premier fait marquant d'un berbère dans l'histoire) : l'ère Sheshonq a été créée (par conséquent, l'année 2018 correspond à l'an 2968 du calendrier berbère). Ce Berbère BCBG aurait, selon la  propagande kabyle, vaincu et défait le Pharaon Ramsès II  troisième pharaon de la XIXe dynastie égyptienne qui,  né aux alentours de -1304 et mort à Pi-Ramsès vers 1213 , n’aurait pas pu être contemporain de ce premier pharaon berbère ! Mais, les manipulateurs de l’histoire n’en ont cure de cela ! En  fait, tout se passa autrement et beaucoup plus prosaïquement : Sheshonq, parvient   à s'allier à la famille royale en faisant épouser à son fils Osorkon la propre fille de Psousennès II de Tanis. À la mort du roi, il s’impose comme pharaon et fonde la XXIIe dynastie qui occupera le pouvoir jusque vers 715 av. J.-C.. Il reprend la politique d'entente cordiale avec ses voisins que ses prédécesseurs avaient initiée. Par ailleurs,  on connaît des ancêtres du fondateur de la dynastie: ces derniers gravitaient déjà à des postes à responsabilités importantes dès la fin de la dynastie précédente. Ils cumulaient des charges religieuses et militaires, héritant de père en fils de titres prestigieux à la cour tels que père divin et spécifiques à leur ethnie comme celui de grand chef des Mâ. Enfin cette généalogie relie directement la lignée aux tribus libyques, le premier ancêtre cité étant simplement désigné comme le Libyen Bouyouwawa.


Avec le temps l'innovation a été adoptée avec conviction pa r de nombreux militants de la culture berbère et fait maintenant partie du patrimoine de l'identité de cette nation, intégrées dans les modes traditionnels de relation à l'agenda de l'Afrique du Nord.(Si veda Seïdh Chalah, "Asezmez (Calendrium)", le magazine Tira no 02, Yennayer 2000/2950, p. 4.)

Les mois et les saisons

Tableau N° 2 - Les noms des mois en fonction des variations linguistiques en Afrique du nord (berbère et arabe)
Mois
Chleuh (Sud Marocain)
Kabyle (Algérie)
Chaoui (Algérie)
Berbère de Djerba (Tunisie)
Arabe Marocain
Berbère néologique8
Janvier
innayr
(ye)nnayer
yennar
yenná(ye)r
yennayer
yenyur
Février
xubrayr
furar
furar
furá(ye)r
febrayer
sinyur
Mars
mars
meγres
meγres
marsu
mars
krayur
Avril
ibrir
(ye)brir
brir
ibrír
abril
kuẓyur
Mai
mayyuh
maggu
mayu
mayu
mayou
semyur
Juin
yunyu
yunyu
yunyu
yunyu
younyou
seḍyur
Juillet
yulyu
yulyu(z)
yulyu
yulyu
youlyouz
sayur
Août
γuct
γuct
γuct
awussu
ghoucht
tamyur
Septembre
cutanbir
ctember
ctember
ctamber
choutanbir
tẓayur
Octobre
kṭuber
(k)tuber
ktober
ktúber
ouktoubr
mrayur
Novembre
duwanbir
nu(ne)mber
wanber
numbír
nuwanbir
yamrayur
Décembre
dujanbir
bu- (du-)jember
jamber
dujámber
dujanbir
meggyur

La transcription des noms en des différents dialectes berbères correspond à la normalisation Académie berbère et INALCO.
La case "berbère néologique" correspond à la reconstruction de termes authentiquement berbères.
Le calendrier berbère est découpé en quatre saisons de trois mois chacune. La correspondance avec le calendrier grégorien est notée entre parenthèses :

Tableau N° 3
SAISONS
1° MOIS
2 ° MOIS
3° MOIS
Tagrest : hiver.



1. Jember (décembre) : du 14 décembre au 13 janvier ;

2. Yennayer (janvier) : du 14 janvier au 13 février ;
3. Furar (février) : du 14 février au 13 mars
Tafsut : printemps.
juin.
1. Meγres (mars) : du 14 mars au 13 avril ;

2. Ibrir (avril) : du 14 avril au 13 mai ;

3. Mayyu (mai) : du 14 mai au 13

Iwilen/Anebdu : été.


1. Yunyu (juin) : du 14 juin au 13 juillet ;

2. Yulyu : (juillet) : du 14 juillet au 13 août ;

3. γust ou Awussu : (août) : du 14 août au 13 septembre ;
Amewan/Iweğğiben : automne.

1.ctember (septembre) : du 14 septembre au 13 octobre ;

2.Tuber (octobre) : du 14 octobre au 13 novembre ;

3. Wamber (novembre) : du 14 novembre au 13 décembre


Néologisme et traditions

Un aspect intéressant du point de vue anthropologique, en ce qui concerne la naissance de traditions, est l'épanouissement d'innovations visant à « rétablir » les revendications des traditions perdues.
C'est un phénomène compréhensible dans le contexte de la redécouverte d'une identité longtemps niée et cachée, qui s'accompagne nécessairement du souci de se réapproprier des traits culturels perdus ou en voie de disparition. En particulier, c'est ainsi que de nombreuses innovations calendaires finissent de nos jours par emporter un large consensus et par être considérées comme faisant partie d'un authentique patrimoine traditionnel.


Les noms des mois 

Puisque certains ne connaissaient pas les noms de mois puisque les noms figurant plus haut, connus seulement dans les milieux universitaires, certains ont tenté de reconstruire les noms « authentiquement berbères » de plusieurs mois de l'année.
À partir de ce mois connu, le premier (yennayer), par ignorance du sens du nom latin, certains ont imaginé qu'il était composée du mot berbère yan (le numéro « un » dans plusieurs dialectes berbères) + (a) yur, "Lune / mois, et sur cette base, ont reconstruit toute la série des noms de mois, que voici avec leur écriture en tifinagh (écriture berbère :

(NOTE : Achab (1996: 270) quelque proposistions de néologismes présentés dans le premier numéro du culturel marocain Tifawt, da Hsin Hda (avril-mai1994).)

Tableau N° 4
1. Yenyur  ou Yennayur
ⵢⵏⵢⵓⵔ ou  ⵢⵏⵏⴰⵢⵓⵔ
2. Sinyur
ⵙⵉⵏⵢⵓⵔ
3. Krayur
ⴽⵔⴰⵢⵓⵔ
4. Kuẓyur
ⴽⵓⵥⵢⵓⵔ
5. Semyur
ⵙⵎⵢⵓⵔ
6. Seḍyur
ⵙⴹⵢⵓⵔ
7. Sayur
ⵙⴰⵢⵓⵔ
8. Tamyur
ⵜⴰⵎⵢⵓⵔ
9. Tẓayur
ⵜⵥⴰⵢⵓⵔ
10. Mrayur
ⵎⵔⴰⵢⵓⵔ
11. Yamrayur
ⵢⴰⵎⵔⴰⵢⵓⵔ
12. Meggyur
ⵎⴳⴳⵢⵓⵔ



Les jours de la semaine

 Dans la même logique, concernant les jours de la semaine dont le nom autochtone est ignoré, on a essayé de « réparer » avec de nouvelles créations.
Il y a actuellement en circulation deux séries :
·       La première et la plus répandue (des noms de jours de semaines déjà usités dans certaines régions), t
·       La deuxième série utilise la même procédure que pour les mois, à savoir une création avec l'ajout d'un suffixe de type "di" au lieu de -yur. À noter que la première série commence par le lundi et que la seconde se fonde sur le nom des jours de la semaine selon l'ordre en arabe, où la première journée correspond au dimanche. (NOTE : Si veda Seïdh Chalah, "Asezmez (Calendrium)", le magazine Tira no 02, Yennayer 2000/2950, p. 4.)


 Tableau N° 5 - La semaine "berbère"
jour
Académie berbère
Composition numérale
lundi
arim
aynas
mardi
aram
asinas
mercredi
ahad
akwas
jeudi
amhad
akras
vendredi
sem
asimwas
samedi
sed
asiḍyas
dimanche
acer
asamas


Les jours et les prénoms

 Souvent, les calendriers et almanachs publiés par des militants et des associations culturelles berbères contiennent, à l'imitation des calendriers occidentaux, la combinaison de prénom pour chaque jour de l'année. Cela répond aussi à la nécessité de redéfinir le prénom traditionnel, qui à la suite des mesures d'arabisation en Algérie et au Maroc ont eu tendance à être remplacé par des noms strictement arabes. Même dans ce domaine, très émotionnellement entendu, il n'est pas rare de trouver des listes de noms improvisés avec des noms empilés en vrac, le résultat de lectures aléatoires ou vraies, de constructions grammaticales, typographiques ou bien des éponymes ou toponymes oubliés. (Une analyse du phénomène, son histoire et son identité, et les implications politiques: Mohand-Akli Haddadou, "Ethnonymie, onomastique et réappropriation identitaire. Le cas du berbère", in: Foued Laroussi (a cura di), Plurilinguisme et identités au Maghreb, [Mont-Saint-Aignan], Publications de l'Université de Rouen, 1997, p. 61-66.)



Les stations de l'année




Une page d'un almanach Tunisien, il montre la correspondance de 1 Yennayer 3ajmi (en rouge) avec le 14 janvier du calendrier grégorien. Le texte en bas encadré, signale le nouvel an 3ajmi et le début des layali essoud ("les nuits noires").

Sur les quatre saisons, toutes n'ont pas conservé leurs appellations berbères : les noms de printemps et d'été sont utilisés presque partout ; plus rarement le nom de l'hiver, usité surtout dans le nord. Uniquement dans le djebel Nefoussa , en Libye on continuera à utiliser le nom berbère de l'automne.

                                                 Tableau N° 6
Printemps

  tafsut  
15 furar (= 28 février)
Été

  anebdu   
17 mayu (= 30 mai)
Automne

  amwal (11)
17 γusht (= 30 août)
Hiver

  tagrest  
16 numbir (= 29 novembre)


(NOTE 11 : amwal est la forme enregistré dans le Djebel Nefoussa "Notes d’onomastique jerbienne et mozabite", in K. Naït-Zerrad, R. Voßen, D. Ibriszimow (éd.), Nouvelles études berbères. Le verbe et autres articles. Actes du "2. Bayreuth-Frankfurter Kolloquium zur Berberologie 2002", Köln, R. Köppe Verlag, 2004, p. 29-39, in partic. p. 33.)

Un aspect intéressant est le contraste entre les deux périodes de 40 jours chacune, considérée comme la plus froide en hiver (« Nuits » llyali) et la plus chaude de l'été (« La canicule », ssmaym, awussu)


Tableau N° 7
14 janvier

1er yenayer, jour de l'an berbère suivi d'udan Imellalen;
03 février  

21 yenayer, azara ou début de retour au climat clément;
13 février 

31 yenayer, jour de l'emprunt, Amerdil ou jour de la chèvre;
28 février 

15 furar, Tafsut 1er jour du printemps suivi de Tizegwaγin;
12 mars 

27 furar, début de la période lhussum jusqu'à imγaren, période de froid piquant;
9 avril  

23 meγres, ahaggan, pluies néfastes;
10 mai 

27 yebrir, mi-nissan, pluies bénéfiques;
30 mai 

17 maggu, Anebdu l'été;
07 juillet

24 yunyu, laïnsara feu de joie et fumigation des arbres fruitiers;
25 juillet 

12 yulyu, 1er awusu, entrée de la canicule, période où l'on procède au rite préventif contre les maladies par l'aspersion, les ablations et les baignades;
30 août 

17 γusht, amwal l'automne;
01 novembre 

17 tuber, 1er jour des labours appelé aussi "labours d'Adam";
29 novembre 

16 numbir, tagrest l'hiver;
25 décembre 
12 dujember, iberkanen;



Tagrest - La porte de l'année
Au-delà des mois dans le calendrier agricole traditionnel, il existe d'autres marqueurs qui sont les « saisons » ou « périodes » fortes, elles marquent par des occasions spéciales et des célébrations. Pour ces moments cruciaux, J. Servier utilise le nom évocateur de porte de l'année (tibbura useggwas) (NOTE : , Servier (1985, p. v e passim). Bien que ce terme apparaisse normalement utilisé qu'au singulier pour indiquer la période de solstice d'hiver. (NOTES : En particulier Bouterfa (2002, p. 13 e passim) a souligné le lien du premier mois de l'année(lié au solstice d'hiver), la divinité Janus (latin Ianus) et le nom latin de la "porte", ianua. +  Cf, Dallet (1982: 38, s.v. tabburt): "tabburt useggwas/tibbura useggwas, le début de l'année agricole, le temps du premier labour".)

Udan - Les Nuits
La période la plus froide est composé de 20 « nuits noires » (En berbère: udan iberkanen, En arabe: allyali essoude), du 12 au 31 dujamber (25 décembre - 13 janvier grégorienne), et de 20 « Nuits blanches » (udan imellalen en berbère, en arabe al-lyali al-bid) en commençant le premier jour de yennayer correspondant au 14 janvier grégorien. ainsi, c'est par l'adage populaire ad-fghen iverkanen ad-kechmen imellalen (et sortiront les nuits noires et rentreront les nuits blanches) qu'est accueilli Yennayer; l'Ixf u seggwas (le jour de l'an berbère).
(NOTES : La durée de cette période, voir, parmi d'autres, Salmon (1904, p. 233), Joly (1905, p. 303), chapitre "Llyali et Ssmaym" de Genevois (1975, p. 21-22). + Ainsi les rapports, sur la kabylie, Servier (1985, p. 376).


Yennayer - 1er jour de l'an
La première journée de l'année est la journée célébrée le plus diversement dans les régions d'Afrique du Nord. Elle est marquée par un repas traditionnel avec des aliments particuliers, différents selon la région. Par exemple, un couscous aux 7 légumes ; mais dans de nombreuses régions, est également attendu le sacrifice d'un animal (généralement une bête à plumes, ou un bouc).

Mais, trois choses nous interpellent, ici :
·       La caractéristique de ce jour férié, qui est souvent confondu avec celui de la journée de l'achoura (fêtes du calendrier musulman).
·       La présence dans de nombreuses régions de formules rituelles d'invocations type bennayu, babiyyanu, bu-ini, etc. Toutes ces expressions qui, selon de nombreux spécialistes, pourraient représenter la corruption des anciens souhaits bonus annus (NOTE : L'étymologie, proposée bu-ini de Aurès de Masqueray (1886: 164), a été acceptée et étendu à d'autres termes similaires liés au démarrage des festivités par plusieurs auteurs, y compris Doutté (1909: 550), Laoust (1920: 195), Delheure (1988: 156). Drouin (2000: 115) definisce queste ricerche etimologiche "poco convincenti".)
·       Un curieux aspect de la célébration de Yennayer est ce qui concerne la date de la nouvelle année : bien que la date de cet anniversaire fut un temps le 14 janvier18, comme dit plus haut, probablement, la conviction commune que la date du « nouvel an berbère » est le 12 et non pas le 14 janvier en Algérie a été introduite probablement par certaines associations culturelles berbères très actives. Il est sans dire que la célébration de yennayer auparavant débutait 3 jours avant le 14 janvier. (NOTE : Genevois: « Le calendrier agraire (le calendrier julien antique) a donc, sur le calendrier grégorien, actuellement un retard de 13 jours ». (1975: 11) 


Leussum/Imbarken - Le froid piquant
Avant que le froid ne s'en aille complètement commencera le printemps. Il y a une période de redouté, une dizaine de jours entre les mois de mars et furar (les 5 dernières furar et les 5 premiers mars). C'est une période caractérisée par de forts vents où l'homme devrait cesser de nombreuses activités (agricole et artisanale), de se marier ou de sortir la nuit, et en général doivent laisser le champ libre à des pouvoirs mystérieux, qui à cette époque sont particulièrement actifs et en profitent pour célébrer leurs mariages (Dans Djerba, ces créatures sont appelées, par tabou linguistique imbarken, qui signifie béni et donne le nom à cette période)19.

Tafsut - Le printemps
Avec l'entrée du printemps, la nature sort des rigueurs et des affres de l'hiver pour ouvrir la vie sur un nouveau cycle. Les végétaux éclosent à nouveau, la terre se couvre d'un tapis floral bariolé, la chaleur du soleil féconde les graines cachées dans le sous-sol gorgé d'eau.
Il est de coutume chez les berbères d'accueillir le printemps avec l'étonnement et la joie qui marquent toutes les naissances. Aussi, organise-t-on pour la circonstance un dîner particulier Imensi N'tefsut. C'est un moment de retrouvailles conviviales. Les villageois sacrifient à l'occasion des coqs fermiers, des chapons, des poulardes pour agrémenter l'incontournable avissar, le couscous aux fèves. Le repas n'a pas de caractère rituel.
La tradition consacre, à l'accueil du printemps dans la matinée du premier jour de la nouvelle saison, un ensemble de gestes répétés depuis des lustres (Amagar n'tefsut). Les familles sortent dans les près pour y improviser des pique-niques, y organiser des jeux et surtout se rouler dans l'herbe à la gloire des divinités de la nature, fort nombreuses dans la cosmogonie berbère. Ce geste qui scelle la communion avec les éléments naturels a perdu son sens dans de nombreuses régions du pays, où la rencontre avec Tafsut est encore célébrée. On se roule dans l'herbe pour y prendre les couleurs, les parfums et les odeurs de la terre et du tapis végétal.

Tizeggaγin/Timγarin - Les journées rouges/Les giboulés
Après le dîner de l'ouverture et l'accueil du printemps, la saison démarre par une période de dix jours dénommée Tizegwaγin (les journées rouges). Qualificatif en relation avec des crépuscules flamboyants durant lesquels, le soleil avant de se coucher met le feu aux nuages, le ciel devient pourpre durant près d'un quart d'heure c'est lehmorega. Cette décade est suivie de timγarine (les vieilles capricieuses) d'une durée de sept jours marqués par des changements de temps très rapides. Les quatre saisons défilent dans la même journée, on a droit aux averses de pluie ou de grêle, aux éclaircies, aux froids intenses, ou encore à de grosses remontées de chaleur et de vents du sud.

Ledjwareh/Esswaleh - Le renouveau des végétaux
Du 17 au 22 mars période dite ledjwareh (les blessures), les bourgeons éclosent, les arbres caducs se couvrent à nouveau de petites feuilles et de fleurs.
La semaine qui suit le bourgeonnement est dite esswaleh (les jours utiles) une durée qui correspond à la nouaison de certains végétaux à l'apparition des fruits sur les arbres (7 jours).

Imheznen/Aheggan - Les préparations
Arrivent alors imheznen, les sept jours tristes, les premières journées d'avril marquées par la timbale des cigales durant lesquelles la chaleur s'installe. Certains animaux connaissent leur période de rut. C'est la mue irréversible de la nature, le tournant, une fin de l'hiver retardée par les quatorze jours de ahegan, une période qui dit-on fait trembler les sangliers (yergagi yilef). le ciel est bouché, il fait très froid mais il ne pleut pas. C’est une période où les travaux sur les végétaux sont suspendus. tiftirin (les cycles) consacrent sur sept jours la sortie définitive de cette mauvaise période de l'ahegan pour ouvrir sur les chaleurs du mois de mai. Sept journées pastorales où les paysans soignent leurs troupeaux, s'occupent des nouveau-nés que l'on sort des bergeries pour des séjours en plein air, le contact avec le sol ferme, l'herbe et les fleurs des prairies.

Nissan - Les eaux fécondes
Les pluies chaudes du mois de mai durent 14 jours elles sont appelées nissen (les eaux fécondes). Deux semaines d'averses entrecoupées d'éclaircies, dont le sol qui commence à se fissurer a tant besoin. Les sept journées vertes izegzawen mettent fin à la floraison, certaines céréales forment leurs épis, et les arbres arborent fièrement leurs fruits. Le printemps est alors bouclé par les sept journées jaunes iwraγen. C’est le démarrage de la fenaison, les paysans fauchent l'avoine, la vesce, la petite féverole ; on entame le désherbage des prairies naturelles assouki et des bocages.

Anebdu - L'été
Imellalen - Les Blanches
L'été démarre le 30 mai par les sept journées blanches imellalen, durée du départ des transhumances. Les bouviers et les chevriers mènent des centaines de bêtes sur les lointains pâturages du Djurdjura. C'est naturellement une autre saison.

Ssmaym/Awussu - La canicule d'août
Comme le froid intense de l'hiver, la chaleur dure 40 jours, du 12 yulyuz (= 25 juillet) 20 γusht (= 2 septembre). Le moment fort de cette période est la première de ghusht « août » (également le nom de awussu, très répandue en Tunisie et en Libye, semble revenir à Augustus latin) sont faites sur ce rites, clairement une tradition aussi préislamique que préchrétienne. Il s'agit notamment de feux d'été (qui, dans de nombreux endroits sont organisées autour du solstice d'été : une coutume païenne, comme déjà condamné par saint Augustin dans ses  Sermons 293/B, 5: « Contra reliquias veteris superstitionis hac die persistentes » , ou les rites de l'eau, telles que celles côtières en Tunisie et en Tripolitaine, qui prévoient trois nuits de plongée dans les vagues de la mer dans le but de préserver la santé. Dans ces cérémonies, des familles entières entraient dans l'eau, et avec eux les animaux de compagnie. Bien que le rite ait été revisité par les principes islamiques (ces nuits les eaux du puits de Zemzem, à La Mecque, se jettent dans la mer et ces vagues d'eau douce seraient bénéfique), nombreux appellent ce jour férié la nuit. Il est coutumier d'obtenir des taux de fécondité et d'abondance, les hommes accompagnent les femmes entre les vagues.

Iweğğiben - L'automne
Une autre période très importante pour le calendrier agraire est celle des labours. La date qui semble essentielle à cet égard est le 17 (k)tuber (la terre devient arable). Cette période est appelée en arabe ar: hert adem, c'est-à-dire le labour d'Adam, car à cette époque, le commun de sa progéniture a commencé ses travaux dans l'agriculture.


Le calendrier targui

Concernant la répartition du temps dans l'année, les Touaregs partagent de nombreux éléments avec les Berbères du Nord. Ils se réfèrent à deux cycles différents, l'un au soleil semblable au calendrier julien et l'autre fondé sur la Lune (utilisation liturgique).
Les différences climatiques, biologiques et socio-culturelles du désert par rapport à la moyenne des zones plus tempérées expliquent qu'il existe encore des différences dans la division des saisons.

Interférence avec le calendrier islamique
Tableau N° 7  - Correspondance des noms berbères et arabes dans le calendrier musulman

Nom arabe
Nom berbère
1
Mouharram
Taɛcurt (sud-est- Maroc)
babiyannu (Ouargla)
cashura'(
Djerba)
2
sàfar
Imtfer n Taɛcurt (sud-est- Maroc)
u deffer c
acura
3
Rabia al awal
Tirwayin (sud-est- Maroc)
elmilud
4
Rabia ath-thani
Imtfer n terwayin (sud-est- Maroc)
u deffer elmilud
5
Joumada al oula
Ateffas izwaren (sud-est- Maroc)
melghes (Djerba)
6
Joumada ath-thania
Ateffas wis-sin (sud-est- Maroc)
asgenfu n twessarin « Le reste (l'espoir) de l'ancien » (
Ouargla)
sh-shaher n Fadma (Djerba)
7
ràjab
Win igurramen (sud-est- Maroc)
twessarin « L'ancien »
8
Chaabane
Taletyurte (sud-est- Maroc)
asgenfu n remdan « Le reste (en attente) » Ramadan (Ouargla)
9
ramadàn
Ramḍan (sud-est- Maroc)
sh-shaher n uzum' « Le mois de jeûne » (Djerba)
10
shawwàl
Iswi (sud-est- Maroc)
tfaska tameshkunt « La petite fête » (Djerba)
11
Dhou al qi`da
Inger laɛyad (sud-est- Maroc)
u jar-asneth « Un entre les deux (parties) » (Djerba)
12
Dhou al-hijja
Tafaska (sud-est- Maroc)
tfaska tameqqart « La grande fête » (Djerba)
     

2. L’Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO), dit Langues O'5(prononcer Langzo), est un établissement français d’enseignement supérieur et de recherche chargé d’enseigner les langues et civilisations autres que celles originaires d’Europe occidentale.

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